24 avril 2008

« La loi doit reprendre fidèlement la position commune sur la représentativité »

[ 24/04/08 ]

Au terme d'une réunion, hier, de son bureau national, la CFDT a confirmé qu'elle signerait la « position commune » sur la réforme de la représentativité des syndicats, arrêtée le 9 avril avec le patronat. A la quasi unanimité de ses instances dirigeantes (30 voix pour, 2 abstentions), la centrale de François Chérèque rejoint ainsi la CGT, le Medef et la CGPME, qui ont déjà annoncé leur intention de signer. FO, la CFTC, la CGC et l'UPA ont, de leur côté, rejeté le texte, qui doit désormais être transcrit dans la loi par le gouvernement. Marcel Grignard, secrétaire national de la CFDT et négociateur sur ce dossier, commente les enjeux d'une réforme que beaucoup ont longtemps cru impossible.
La réforme de la représentativité va-t-elle assez loin ?
C'est une vraie rupture et une bonne réponse au manque d'efficacité du syndicalisme. Mais ce n'est pas parce qu'on change les règles que les bonnes pratiques suivront. C'est en réalité un pari. Aller vers les accords majoritaires donne plus de poids à la négociation d'entreprise, mais si la réforme devait entraîner un appauvrissement du nombre d'accords, les partenaires sociaux auront juste fait la démonstration de leur incapacité à redynamiser la démocratie sociale.
Comment fera-t-elle évoluer le dialogue social ?
Pour qu'un accord soit valide, il faudra à la fois l'engagement de syndicats représentant au moins 30 % des salariés et l'absence d'opposition majoritaire. On aboutira donc à des accords équilibrés et surtout légitimes, car souhaités par un grand nombre. Ces nouvelles règles obligeront le patronat à rechercher des accords plus consensuels et les syndicats à faire preuve de plus de responsabilité. Dans les entreprises, on a déjà pris des habitudes allant dans ce sens, mais au niveau des branches et de l'interprofessionnel, c'est un changement radical.
Le gouvernement doit désormais transcrire dans la loi la position commune arrêtée par les partenaires sociaux. Craignez-vous qu'il modifie le texte ?
La loi doit reprendre fidèlement et dans son intégralité la position commune sur la représentativité. C'est un ensemble qui aborde des sujets (représentativité, élections, validation des accords, financement, etc.) qui s'articulent. Il est normal que l'opinion des organisations non signataires soit entendue, mais le texte prend déjà largement en compte leurs souhaits. Les seuils de représentativité dans les branches ont été ramenés à 8 % à la demande de la CFTC, et la CGC a obtenu la prise en compte de l'audience sur les collèges spécifiques à l'encadrement. Tout cela doit inciter le gouvernement à considérer que ce texte est équilibré. Ce n'est pas, contrairement à ce que certains disent, une forme d'oukase de la CFDT, de la CGT et du Medef. Nous sommes confiants car le texte donne de la légitimité aux partenaires sociaux et consolide la démocratie sociale et le contrat. Nicolas Sarkozy l'a d'ailleurs souligné lui-même.
Le texte n'aborde pas la question de la hiérarchisation des normes entre la loi, les accords d'entreprises, de branches... Est-ce au gouvernement d'arbitrer ce point ?
Aujourd'hui, la loi Fillon de 2004 permet aux accords de différents niveaux de déroger au niveau supérieur. Ce cadre donne la respiration suffisante aux différents niveaux de négociation et fonctionne bien. Il n'y aucune raison de le modifier.
Cette réforme pourrait provoquer la recomposition du paysage syndical, comme en témoigne le projet de fusion entre l'Unsa et la CGC. La CFDT envisage-t-elle aussi des rapprochements ?
C'est un débat que nous aborderons plus tard. Ce que je peux dire sur le fond, c'est que le syndicalisme est trop divisé pour peser efficacement. Il ne peut pas s'en sortir sans une plus grande coopération entre organisations. La vraie question, ce n'est pas le nombre de syndicats, mais l'efficacité du syndicalisme. Quand il se transforme en guerre d'électorat et en incapacité à se mettre d'accord, c'est toujours préjudiciable aux salariés.

Quand tout le monde collabore, c'est une force.

MARCEL GRIGNARD - SECRÉTAIRE NATIONAL DE LA CFDT
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