5 juillet 2009

Une usine voit son sort ballotté par les urnes

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Politiques 03/07/2009 à 06h51 Par GAËL COGNÉ
Dassault étant inéligible, Altis Semiconductor a vu s’évanouir un montage financier. Des emplois sont menacés.
Devant les barrières de l’usine Altis Semiconductor, le bitume est crasseux. Là, des pneus ont brûlé plusieurs jours. Une colonne de fumée oblique indique la colère des salariés menacés d’un plan social prévoyant la suppression de 400 postes à Corbeil-Essonnes. Du jamais vu dans cette entreprise de composants électroniques, même lorsque 320 emplois avaient été supprimés en 2006. Finalement, après une semaine de grève (du 15 au 23 juin), la reprise a été votée à 9 voix près (sur 550 votants). La direction venait de proposer une prime de 28 000 euros pour les salariés éligibles au départ volontaire (plus de 10 ans d’ancienneté), plus 1,2 mois de salaire par année d’ancienneté.
Le cœur n’y était pas, mais tout le monde est retourné au travail. Jusqu’à l’annonce de l’annulation des municipales, l’avenir d’Altis n’était pas si bouché. Secouée par la crise, la direction de l’entreprise, aujourd’hui détenue par IBM et Infineon, devait procéder à un MBO (un management buy out).

Cette procédure permet à la direction d’avoir recours à un prêt pour investir dans l’entreprise. Selon, Frédéric Brunier (CFDT), secrétaire du comité d’entreprise, le montage financier prévoyait qu’un proche du maire (UMP) Serge Dassault (dont le nom est gardé secret) investisse 60 millions d’euros, auxquels s’ajoutaient 30 autres millions de prêt contracté auprès d’entreprises et enfin 10 millions dont Dassault se portait garant.
Mais patatras, Dassault inéligible, l’argent s’évanouit. «Il apparaît clairement que le plan de reprise d’Altis était suspendu aux affaires politico-judiciaire de M. Dassault, puisque dès que le Conseil d’Etat l’a déclaré inéligible, tout s’est subitement envolé. Tout est officiellement gelé depuis l’invalidation.»
Alors que des proches de Dassault expliquent que les éventuels investisseurs «se demandent s’ils peuvent avoir confiance en d’autres dirigeants éventuels», les syndicats et le député (PS) Manuel Valls accusent l’avionneur de «chantage politique».

«C’est surréaliste de mettre 1 500 emplois en balance pour son seul avenir politique», grince Frédéric Brunier.
C’est la deuxième fois qu’un plan de reprise capote.

«En août 2007, Dassault avait parlé d’un investisseur russe»,
explique Philippe Gaudin de la CFTC. Le sénateur-maire avait été jusqu’à prendre son Falcon personnel pour rencontrer Vladimir Poutine, le 11 septembre 2008. Mais rien n’y avait fait. «Il a fallu repartir pour un autre projet», se souvient Serge Cavanna de la CFDT.
Exaspérés du manque de transparence, les syndicats ont fait valoir un droit d’alerte en comité d’entreprise. Leurs élus ont déclaré qu’ils porteraient «plainte pour délit d’entrave». «Au sein de Altis, explique Frédéric Brunier, je peux vous assurer que le nombre de personnes connaissant le nom du repreneur est inférieur aux doigts d’une main. Néanmoins puisqu’ils sont au courant, ils doivent nous informer.»

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